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Sickboy Moviez
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30 octobre 2011

OMAR M'A TUER

Omar-M-a-Tuer-GrandeIl fallait bien qu'un jour un cinéaste se penche sur le cas d'école si j'ose dire d'Omar Raddad, et bien c'est fait depuis l'année dernière. Et pas forcément de la part de celui qu'on attendait. Mais Roschdy Zem s'en est bien tiré, avec les honneurs, et nous offre un film sobre, simple, sans trop tomber dans le pathos. Après, de deux choses l'une. Ou vous approuvez sa démarche partiale, ou vous préférez l'objectivité, et je vous renverrai alors vers les nombreux documentaires existants sur le sujet.

Zem a choisi le camp d'Omar, et on ne peut pas le blâmer pour ça, parce que sa démarche est honnête et saine. Après tout, offrir une tribune à un des innocents les plus célèbres de France était la moindre des choses pour rectifier un peu le parcours déviant de l'histoire. A la manière du "Pull-Over Rouge" de Michel Drach, Zem se veut l'avocat à posteriori de Raddad, et force est d'admettre qu'il a rempli son contrat haut la main.

Adapté de l'autobiographie de Raddad, Omar M'a Tuer est construit comme un cauchemar, celui d'un accusé qui n'a jamais compris ce qu'on pouvait lui reprocher. L'alternance entre les scènes offertes aux deux rôles principaux est un modèle de mise en abîme, chose assez rare dans le pamphlet historique à la française. Mais plus que ça, le film est un poème dramatique avec des rimes tristes. Omar dans son petit appartement, Omar au commissariat, Omar au tribunal, Omar en prison, contraste avec Pierre-Emmanuel Vaugrenard dans son hôtel quatre étoiles ou Pierre-Emmanuel Vaugrenard enquêtant dans la somptueuse villa de la victime. Cet écrivain pseudo réactionnaire est impeccablement interprété par un Podalydès au sommet de sa forme, qui alterne les réflections humanistes et les coups de sang face à l'injustice, partagé entre le désir de faire son travail et celui de faire un coup publicitaire. Une ambivalence parfaitement restituée par un acteur caméléon qui n'en finira jamais de nous étonner.

Mais bien évidemment, la vedette du film, c'est lui, Sami Bouajila, déjà vu dans tant de fois...Son jeu est incroyable, il passe par toutes les émotions, toujours en toute sobriété, nous émeut d'un simple regard, d'un simple mot qui évoque l'incompréhension mieux que n'importe quel discours. Il campe son personnage avec dignité, et de fait, rend le plus bel hommage à Omar Raddad qui soit. On peut appeler ça un rôle à César, ou bien la quintessence du métier d'acteur, quand l'artiste se fond dans son rôle au point de ne faire plus qu'un avec l'homme qu'il incarne. Et perdre quinze kilos au passage.

Alors oui, certaines scènes sont un peu emphatiques, notamment celles du procès, parfois Podalydès en fait un peu trop, et de temps à autre Zem joue un peu trop sur la corde sensible, mais ces défauts font aussi les qualités du film, et lui permettent de rester dans une dimension humaine. Car c'est bien de ça dont il est question ici, d'humanité. Celle que n'a pas eu la justice française une fois de plus, et l'humanité de ceux qui ont refusé l'évidence, refusé des preuves un peu trop évidentes. Et comme le dit si bien Maurice Bénichou, qui incarne le célébrissime Jacques Vergès : "C'est la première fois que je travaille avec un innocent".

Omar M'a Tuer est un film d'hommes, qui font montre d'empathie envers un autre homme, qui n'avait rien demandé à la vie, rien d'autre que de s'occuper d'un jardin, sans savoir lire ni écrire. Mais le véritable illétré n'est pas celui que l'on croit. C'est celui qui ne sait pas lire avec son coeur. Celui de Zem est énorme. Et comment retenir ses larmes lorsqu'Omar rentre chez lui, après sept années d'incarcération injustes, pour retrouver sa famille. Retrouver un semblant de vie, celle qu'on lui a volée.

Le film de Roschdy Zem ne lui rendra pas ces années perdues, ni son honneur bafoué, mais vous ouvrira peut être les yeux sur ces gens trop humbles pour croire que la justice soit capable de commettre une erreur.

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