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28 octobre 2014

HOUSEBOUND

HB-POSTER_QUOTES_PORTRAIT_A2_Frame_v5En cinéma, trouver l’équilibre parfait entre comédie et horreur est un exercice périlleux et excessivement difficile. Nombre de pastiches, de parodies et de démarquages sont souvent tombé dans la gaudriole pure tout en oubliant de faire peur au passage, tandis que d’autres ont trop misé sur le grotesque des effets gore pour faire rire le public. Les œuvres de qualité du cinéma fantastique titillant agréablement les zygomatiques, tout en cherchant la scène choc destinée à surprendre le public lambda sont rares, voire…Introuvables.

 

Certes, vous ne manquerez pas de me rappeler au bon souvenir de films phares tels que Shaun of the Dead, Return of the Living Dead, Braindead, ou Bad Taste, mais vous aurez partiellement, voire complètement tort. Aussi magistraux soient ces films, ils ne déclenchent jamais l’effroi, appuyant plus sur la pédale du rire que sur celle de la peur. D’où mon postulat de départ qui s’avère encore plus vrai à la lumière de ces précisions. Pourtant, ce fameux et tant recherché équilibre pourrait bien avoir été trouvé par un jeune réalisateur Néo Zélandais, Gerard Johnstone.

Plus connu pour son travail à la télévision en tant que créateur de la série à succès The Jaquie Brown Diaries, Johnstone vient d’accoucher d’un premier long qui risque à long terme de faire date dans l’histoire du cinéma local, au même titre que les premiers travaux de Peter « Tolkien » Jackson. Car en effet, Housebound à tout pour devenir la nouvelle référence du cinéma fantastique Néo Zélandais, au même titre que Braindead ou The Frighteners.

 

Son avantage ? Etre aussi indispensable que les deux titres sus-nommés, sans pour autant leur ressembler. Mais à choisir, je dirais qu’il se rapproche plus du second dans son utilisation d’un comique de situation imparable, que du premier et de son gore paillard qui tâche. Intrigue ? Intrigue !

 

Kylie Bucknell, délinquante droguée tente un casse foireux pour voler la caisse d’un distributeur automatique. Arrêtée, elle est condamnée à huit mois de réclusion, qui au vu de son passif sont transformés en huit mois de résidence forcée, chez sa mère qu’elle n’a plus vue depuis son adolescence. Equipée d’un bracelet électronique à la cheville, elle s’en retourne là où elle a passé son enfance avec un certain effondrement, retrouvant sa mère qui semble il n’a pas changé d’un pouce, toujours autant fascinée par les ragots de voisinage et les discussions fleuves. Après des retrouvailles houleuses, Kylie tombe sur un témoignage téléphonique de sa mère diffusé à la radio, dans le cadre d’une émission consacrée au phénomènes surnaturels. Abasourdie par ce qu’elle entend, elle agresse cette dernière pour en savoir plus, et apprend finalement qu’un esprit hanterait la maison, esprit que Miriam Bucknell a aperçu un jour dans sa cave, dissimulé sous des hardes blanches déchirées. Consternée, Kylie prend  la pauvre Miriam pour folle, jusqu’au jour où elle aussi devient le témoin de phénomènes inexpliqués. Désespérée à l’idée de ressembler à son ascendante, elle commence par nier ces phénomènes, avant de devoir se rendre à l’évidence…Elle, Miriam et Graeme son beau-père taciturne ne semblent pas seuls dans la maison…Dès lors, elle va mener son enquête pour en savoir plus, à l’aide d’Amos, son geôlier à distance expert en paranormal, et tous deux vont finir par découvrir l’horrible vérité qui se cache derrière cette affaire…

 

Je vais être franc. Housebound est une réussite totale, et ce, dès les premières minutes. La scène du casse initiale met la barre très haute, et celle ci ne redescend jamais jusqu’à la fin du film. C’est le plus bel exemple d’harmonie parfaite entre humour et terreur que j’ai vu depuis des années, ou même vu tout court, et rien que pour cela, il mérite toute votre attention. Mais en sus de cette constatation, c’est un premier long incroyablement bien fait, reposant sur un pitch simple et classique, qui le transcende pour en faire quelque chose de complètement neuf et frais. Et même si je dois admettre que la « terreur » en tant que concept sensoriel laisse la plupart du temps la place à la tension et au stress de situation, certaines scènes sont suffisamment bien troussées pour impressionner.

 

Sous l’apparence d’une mise en scène classique, exploitant un décor coutumier (maison isolée aux recoins sombres et inexplorés, passages secrets, voisinage inquiétant et sauvage),  Gerard Johnstone explose les compteurs en se reposant sur un casting impeccable et des dialogues savoureux. Si Morgana O'Reilly (Kylie) campe une héroïne très crédible dans son cynisme muant en peur panique, l’impayable Rima Te Wiata (Miriam) se taille la part du lion dans la peau de cette mère un peu à la masse, débitant des banalités de quartier avec une passion dévorante dans la voix, et un peu honteuse de devoir admettre que son quotidien si « normal » est perturbé par une entité menaçante. Les scènes opposant la mère et la fille sont toutes extraordinaires, mais au bout du compte, et après visionnage attentif, je n’ai pas le sentiment qu’une seule séquence soit facultative ou moins intéressante. Et je peux vous jurer que beaucoup de situations sont vraiment hilarantes et vous laissent des crampes à la mâchoire!

 

Housebound dans le fond et dans la forme, est irréprochable. Intrigue allant crescendo, galerie de personnages délicieuse et improbable, twist à répétition totalement crédible, c’est une entrée en matière tonitruante qui laisse pantois. Et pas besoin d’être fan du genre pour en apprécier toutes les trouvailles. Aucune ficelle, qu’elle soit verbale ou graphique ne semble trop grosse, chaque réplique sonne juste, chaque acteur est à sa place, dans le ton. Evidemment les deux premiers rôles attirent le plus l’attention. Mais quelle rangée de seconds couteaux ! Là aussi, au même titre que Rima Te Wiata, c’est Glen-Paul Waru qui passe la corde avec une large avance, tant son interprétation est tout simplement hallucinante ! Certes, il a été gâté par les scénaristes qui lui ont concocté un costume sur mesure, mais il incarne avec un tel naturel cet agent de sécurité maître es paranormal qu’il convient de le saluer avec les honneurs qu’il mérite. Passant d’une scène à l’autre d’un aplomb total à une approximation hilarante, il se cogne à tout ce qui se présente sur son passage (la séquence durant laquelle lui et Kylie s’introduisent chez le voisin est énorme, et je pense que vous verrez les dentiers d’un autre œil après ça…), mais garde un sérieux imperturbable même lorsque les circonstances échappent à toute logique.

Outre ce phénomène hors norme, Housebound peut aussi compter sur un Ross Harper (Graeme) sobre mais remarquable en beau père effacé et mal à l’aise lorsqu’il doit s’exprimer (autre scène d’anthologie dans la cave, lorsqu’il se retrouve face à face avec Kylie mais…ne sait pas quoi dire !), et un Ryan Lampp halluciné et lunaire dans un rôle dont je ne peux vous parler sans vous révéler une des parties les plus importantes de l’intrigue du film.

 

Mais sous cette apparence de comédie horrifique totalement débridée, se cache aussi un joli conte familial décrivant avec une apparente désinvolture toute la complexité des relations mère/fille, lorsque la vie décide de faire imploser la cellule familiale et de laisser un des deux parents seul face au problème de l’éducation et de la rébellion. En ce sens, le duo Kylie/Miriam est exemplaire, et leur relation complexe qui a souffert de l’éloignement et du rejet de la mère par la fille est aussi une des clés du film, apportant une touche d’émotion à un métrage qui développait déjà des qualités comiques et horrifiques énormes. Si les répliques de Miriam ont déjà tout pour devenir cultes (passez vous et repassez vous son solo lors de la discussion avec le psy et le flic vers la fin du film et vous comprendrez), sa gestuelle et ses mimiques de tristesse et de déception sont touchantes, et l’évolution du personnage de Kylie, qui finalement se rend compte qu’elle a perdu des années d’amour en choisissant la voie de la délinquance, viennent en complément apporter une plus value importante.

 

Loin de se contenter d’aligner les scènes de comique de situation un peu paillardes et les dialogues au second degré, Housebound me fait penser à ces chansons aux arrangements riches et à la production rutilante, qui restent fabuleuses une fois interprétées d’une manière acoustique.

Avec un vrai scénario travaillé, une cohérence à tous les niveaux, des personnages développés et attachants, des imbroglios logiques mais surprenants, et quelques situations suffisamment tendues pour justifier du label « horreur », c’est un premier film sidérant de maîtrise, qui prouve que pour certains le passage du petit écran au grand reste d’une facilité déconcertante. Si vous êtes fans de Shaun of the Dead et de Fantômes contre Fantômes, ce film est fait pour vous, même s’il est plus familial que le premier et moins « ectoplasmique » que le second. Mais au niveau de l’incarnation, il est clair que Morgana O'Reilly, Rima Te Wiata et Glen-Paul Waru n’ont rien à envier à Nick Frost, Simon Pegg ou  Jeffrey Combs. Une vraie découverte, une vraie bonne surprise, et un film qui se voit, donne envie d’être revu, ne serait ce que pour apprendre par cœur certaines répliques. Chapeau bas, et méfiez vous des gens qui vivent dans vos murs !

 

Housebound - Bande-annonce VO

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